Bandeau 1

Réforme de la protection de l’entrepreneur individuel

entrepreneur individuel

Réforme du régime de l’entrepreneur individuel

La promulgation, le 14 mai 2022, de la loi relative à la profession indépendante confère aux entrepreneurs individuels, deux différents patrimoines à savoir le patrimoine professionnel et le patrimoine personnel. Cette loi concerne les personnes qualifiées d’entrepreneurs individuels à savoir les commerçants, les artisans, les agriculteurs, les travailleurs libéraux ou les auto-entrepreneurs. Ils travaillent pour eux-mêmes en étant à la fois chef et employé, ceci, sans passer par la case création d’entreprise.

Dans les faits, du fait de son statut de travailleur libéral, ses créanciers n’ont d’autres garanties que ce qui constitue son patrimoine professionnel à savoir ses biens, obligations et sûretés. Or, le travailleur libéral ne peut se passer de son patrimoine professionnel dans l’exercice de son métier. Tout ceci a motivé le législateur à prendre des dispositions légales pour protéger davantage l’entrepreneur individuel. 

Le législateur, par cette réforme, fait la part des choses entre le patrimoine professionnel et le patrimoine personnel de l’entrepreneur individuel. Cette réforme, gratuitement appliquée à l’entrepreneur individuel, définit clairement les limites à respecter en ce qui concerne le patrimoine professionnel de ce dernier.

La mise en vigueur de cette loi vient ôter une épine du pied des entrepreneurs individuels, car ils cherchaient un moyen d’éviter qu’une saisie, des dettes ou d’autres actions les concernant ne viennent affecter leur patrimoine familial, en l’occurrence les biens de leurs conjoints.

Qu’en est-il des entrepreneurs mariés ?

Habituellement, les jeunes couples dont l’un est un entrepreneur individuel sont orientés vers le régime de la séparation de biens qui conserve à chaque époux son patrimoine personnel, contrairement à la communauté réduite aux acquêts qui fait passer dans le patrimoine commun, tout ce que les deux époux ont acquis ou obtenu individuellement ou ensemble, dans le mariage. On parle alors des acquêts.

De fait, lorsque de futurs époux rencontrent un notaire, celui-ci les invite à bien choisir leur régime matrimonial en tenant compte de trois facteurs à savoir :

  • L’actif : qui sera le propriétaire des biens acquis ou créés par chacun pendant le mariage ?
  • Le passif : suivant quel régime seront payées les dettes contractées par l’un ou l’autre des époux ?
  • Et les pouvoirs : la propriété d’un bien acquis pendant le mariage peut-elle revenir à un seul conjoint ?

En général, les entrepreneurs s’intéressent plus au passif puisqu’il détermine la garantie dont disposeront les créanciers en cas de saisie par suite d’une dette non remboursée du conjoint entrepreneur. S’il s’agit d’une communauté, ce sont ses biens propres et les biens communs aux deux conjoints, hormis les salaires du conjoint ; en cas de séparation de biens, il s’agira des seuls biens personnels de l’entrepreneur individuel.

Quel est l’intérêt du choix d’un régime matrimonial particulier ?

La réforme sur la protection de l’entrepreneur individuel, comme indiqué plus haut, a donné un caractère officiel au patrimoine professionnel de l’entrepreneur individuel, en le distinguant clairement de son patrimoine personnel propre ou commun .

Quel que soit le régime choisi, l’entrepreneur individuel bénéficie du même niveau de protection. L’on peut considérer l’époux comme détenteur du patrimoine personnel, mais les biens seront partagés entre les deux conjoints. De même, il peut arriver que le patrimoine personnel appartienne aux deux époux. Toutefois, aucun de ces cas de figure ne restreint la protection dont doit bénéficier l’entrepreneur.

Mais il existe trois cas d’exception :

  • Avec la mise en vigueur de cette réforme, certains créanciers pourraient demander à l’entrepreneur individuel de choisir un régime autre que celui de la séparation de biens, selon les dispositions de la loi. Toutefois, même s’il se marie sous le régime de la séparation de biens, le conjoint n’a rien à craindre pour son patrimoine.
  • Si le conjoint craint de perdre ses biens propres, il faut savoir que la communauté de biens fait passer les biens de chaque conjoint dans le patrimoine commun. Et avec la réforme, si l’entrepreneur individuel se sert des biens de son conjoint dans le cadre de sa profession, le patrimoine attaqué par l’action des créanciers prend en compte les biens propres du conjoint.
  • Il peut arriver que pour une raison ou une autre, le conjoint décide de quitter l’entrepreneur individuel, séparation pouvant se solder par un divorce. Si l’entrepreneur est devenu travailleur indépendant dans le mariage, sans qu’un contrat n’ait été conclu (communauté), l’actif de la communauté prendra en compte la valorisation de l’entreprise individuelle qui sera ensuite divisée entre les deux conjoints, situation qui ne plairait sûrement pas l’entrepreneur individuel.

L’entrepreneur individuel a tout intérêt à opter pour la séparation des biens qui lui sera bien plus profitable, quel que soit le cas de figure, ceci, indépendamment de la mise en vigueur de la réforme.

En somme, il est vrai que la réforme sur l’activité professionnelle indépendante profite à bien d’égards à l’entrepreneur individuel, que ce soit en termes de facilités, de vision ou de projet. Toutefois, ces avantages ne couvrent pas toutes les situations et celui-ci devra, à un moment ou à un autre, créer son entreprise, même s’il bénéficiera de certaines conditions particulières.

Quoi qu’il en soit, il est primordial que l’entrepreneur individuel prenne le temps de bien cerner tous les contours de cette réforme, ainsi que les tenants et aboutissants, avant de choisir ce nouveau statut, pour éviter toute mauvaise surprise.

Dans ce contexte, la consultation d’un notaire est plus que jamais une priorité, car il est le mieux placé pour aider l’entrepreneur dans le choix du statut qui lui conviendra et l’avantagera le plus, à court, moyen et long terme. Si l’entrepreneur individuel a un projet de mariage, la séparation des biens reste sa meilleure option.

Plus qu’avant donc, le rôle du notaire est essentiel : orienter les entrepreneurs dans le choix de la structure la mieux à même de répondre à leurs besoins immédiats et à leurs perspectives d’évolution. Et, si l’entrepreneur a le projet de se marier, il sera toujours opportun de lui conseiller la séparation de biens.

Retour